dimanche 5 septembre 2010

bâtons noirs

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C'est ce monde-là qu'on voulait, avec ses signes de désordre, ses causes opaques, celui qu'on ne connaît pas, qui se déchirerait sous les doigts. Se livrant de lui-même pour aussitôt se retirer, fuyant sans cesse.
Les couleurs y sont entièrement mélangées et donc invisibles, l'heure est sans indice. il fait jour sans aucune ombre.
Le sol est encore présent ainsi que le bas et le haut. la soie du monde crisse sous le stylet d'un scribe caché, inspiré......et une voix verticale, à intervalles réguliers crie, des cris noirs......
mais dans le même temps, chantante, elle habite l'espace, sans discontinuer.
A cause d'elle, on se tient debout, on marche même bancal, et on n'a cherché aucun trou où se réfugier, disparaître.
La pesanteur, la sensation du fin brouillard sur les joues, la buée imprégnant la laine des vêtements, l'idée du jour qui se lève, et les hauts pylônes presque mouvants dans le flou triste du monde
où cette voix sans mots projette son sentiment avec une telle violence, brièveté, et pénètre aussi.......il n'en faut pas plus pour qu'on puisse vivre, respirer, marcher, ou pourquoi pas ? planer.







(KOOLHYDRAAT 2, d i v)

4 commentaires:

Anonyme a dit…

décidément, ce que j'aime bien dans tes textes, c'est cette obstination à poser des questions au réel... c'est un peu des miniatures gigognes à 3 couches... il y a l'objet ( ou la situation ) qui déclenche une émotion ( plus ou moins aigüe ) ou une question vague, ( là, la mémoire se joue ), puis ton texte suit l'émotion... et puis il y a aussi une espèce d'humilité artisane dans l'écriture, qui me touche vraiment...

c'est important pour moi de comprendre de quoi ça parle — enfin pour ce genre d'écriture ( comme dans les romans, par ex ).

( parce qu'il y a aussi l'écriture qui écrit directement sur le cerveau du lecteur )

( l'idéal, c'est peut-être les deux ensemble )

( enfin, pour ce que j'en dis... )

michel g

Anonyme a dit…

Au début, quand je commençais à écrire un poèmes, je savais toujours à peu près ce que je voulais dire. Mais depuis quelques temps ce n'est plus le cas.
C'est pourquoi il me faut souvent partir soit de la description "exacte" d'un épisode réel ("Journal réel"), soit d'une image. Là, c'est une image abstraite, qui se trouve sur le blog de d i v, la première de koolhydraat2 postée au début du mois d'aoùut, je crois.

Il y a aussi des petits bouts de phrase ou des expressions qui me viennent tout seuls, isolés, et que je garde ; peut-être un peu ce que tu dis : ce qui qui s'inscrit directement dans le cerveau...... ici c'est le titre : "bâtons noirs", que j'avais gardé plusieurs mois de côté en attendant de m'en servir.

Tout ça pour dire que j'avance vraiment à tâtons maintenant quand j'écris. Ivar m'a parlé une fois d'une "écriture d'insecte" :-) Ce n'est pas facile parce qu'il n'y a aucun élan au départ, je suis même très souvent complètement découragée en commençant. Mais en avançant, peu à peu des choses s'imbriquent et se révèlent.

merci de tes impressions, ça m'éclaire bien.

Claire

Anonyme a dit…

"écriture d'insecte": je sais pas si il parlait de tes textes, mais l'image - et l'idée - me plait bien...

Qu'est-ce que ça écrit,un insecte ?

michel

Claire a dit…

L'insecte doit commencer par lire, avec ses pattes, les murs, les écailles de peintures, les fentes. Il va partout. Et il a de l'espace une perception sûrement très différente de la nôtre. Moi j'ai compris qu'il voulait dire que c'était tenter de lire et dire la réalité autrement, dans une nouveauté. En tous cas ça m'a bien plu aussi comme commentaire.

Il y a deux autres couches gigogne dans "bâtons noirs", je m'en suis rendu compte après : il y a "L'enterrement" de François Bon, qui parle beaucoup des poteaux électriques le long du cortège, dans lesquels s'engouffre un vent sauvage, comme si le monde ajoutait sa voix, qui se superpose à toutes les paroles des humains. Et puis peut-être un de mes anciens poèmes, qui s'appelle "La peur de n'être rien" et qui dit :
....des mots de folie à lire
sur la portée courbe des lignes électriques
des poteaux comme des gens
aux jambes écartées,
des cigognes sans enfant aux becs
claquants et rouges..."


qu'est-ce que c'est l'art, sinon tout ça mêlé ?